Appel en urgence de l’ONU pour les 2 journalistes emprisonnés

Appel en urgence de l’ONU pour les 2 journalistes emprisonnés

Si le paysage médiatique en RCA a récemment connu des développements positifs (attribution de nouvelles fréquences radio et TV, implantation de Radio Chine Internationale et de  la Voix de l’Amérique sur la bande FM à Bangui, diffusion en continu de la télévision nationale), il faut dire que l’arrestation et la détention de deux journalistes ont changé la donne des relations entre les médias et le gouvernement.

C’est ce mercredi 6 juillet 2011 que Faustin Bambou et Emmanuel Cyrus Sandy, respectivement, directeur de publication des quotidiens « Les Collines de l’Oubangui » et de « Media + » seront finalement jugés sur le fond. Les débats ont été renvoyés à deux reprises. Finalement, le juge a retenu de juger selon le droit pénal et non selon la loi sur la presse. Les deux journalistes sont poursuivis pour « incitation à la haine et à la violence » suite aux articles publiés et accusant le Ministre délégué à la défense de détournement des pensions des retraités militaires et gendarmes. Les fonds en question ont été alloués par l’Union Européenne

Cette affaire qui pose la question de la liberté der la presse est suivie par l’ensemble de la communauté internationale et les associations de journalistes aux plans national et international.

Dans une correspondance en date du 4 juillet 2011, adressée à la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies à Bangui, le directeur de publication du quotidien « Les Collines de l’Oubangui » « sollicite  l’envoi d’un médecin du système des Nations Unies pour constater sur place et m’apporter une assistance médicale ».

Le journaliste explique que le premier substitut du procureur de la république  saisi à trois reprises lui refuse une autorisepour des soins appropriés. Il « souffre d’un furoncle dans le dos suite à une crise de paludisme et qui ne cesse de me rendre la vie infernale ».

On ignore pour le moment la suite réservée par le BINUCA (Bureau intégré des nations Unies en Centrafrique) à cette demande. Mais on s’attend à une action positive de la part de la représentation de l’ONU à Bangui au vu de celles déjà menées en faveur des deux journalistes détenus.

Dans une tentative pour désamorcer la tension croissante sur cette détention, le BINUCA a eu plusieurs rencontres avec les autorités nationales afin d’attirer leur attention sur les conséquences néfastes que cette situation pourrait bien ternir l’image de la RCA en particulier après le succès de la Table Ronde des partenaires de développement à Bruxelles. Le BINUCA a conseillé sur les possibilités juridiques afin d’aboutir à une meilleure solution.

Le BINUCA a déjà rencontré le Ministre de la Justice et son collègue de la Communication. Sur la scène internationale, le BINUCA a saisi le Haut Commissaire pour les Droits de l’Homme de Genève. Ce dernier a engagé une procédure d’appel d’urgence contre cette détention.

Le monde des médiats n’est pas en reste. RSF (Reporters sans Frontières) dans un communiqué daté du 10 juin 2011, réagit ainsi : « Nous condamnons l’incarcération de Faustin Bambou qui a simplement fait son travail en relayant une information d’intérêt public. Les conditions de son arrestation, dépassant la durée légale de la garde-à-vue, représentent déjà une violation manifeste de la loi. En outre, si depuis 2005, aucun journaliste ne peut être arrêté pour diffamation grâce à la dépénalisation de ce délit de presse, nous déplorons que cela soit encore permis dans les cas d’incitation à la violence. Devant le caractère abusif de ce chef d’inculpation, nous demandons au procureur de revenir sur ces accusations, de mettre un terme immédiatement à ces procédures judiciaires et de relâcher le journaliste »

A Bangui, plusieurs quotidiens de la capitale centrafricaine ne sont pas parus lundi 4 juillet 2011. Les 4 directeurs de publication des journaux ont décidé d’observer « une journée sans journaux ». Par ce geste, ils entendent marquer leur solidarité avec leurs 2 confrères emprisonnés. Il s’agit des journaux suivants : « Le Citoyen », « Le Confident », « Le Démocrate » et l’«Hirondelle ».

Selon Mathurin Momet, directeur de publication du journal « Le confident », interrogé par Radio Ndeke Luka, « la raison de ce geste de solidarité a été prise pour interpeller non seulement les autorités politiques ou judiciaires, mais aussi dénoncer le comportement des autres confrères réunis au sein du comité ad hoc du Groupement des Editeurs de la Presse Privée et Indépendante de Centrafrique (GEPPIC). Ces confrères ont tenu une assemblée générale en marge du procès, le même jour, ce qui sans doute fragilise la solidarité à l’endroit des journalistes détenus à la prison centrale de Ngaragba».

La République centrafricaine occupe la 69e place sur 175 pays, du classement mondial 2010 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.