Le procès de Jean Pierre Bemba suspendu jusqu’au 22 août

Le procès de Jean-Pierre Bemba a été suspendu le 11 juillet, et reprendra le 22 août après les vacances judiciaires, avec l’audition du 26ème témoin de l’accusation. Entre le 1er et le 11 juillet, le témoin 168, considéré par le procureur comme l’un de ses témoins clés, a déposé à huis clos.

Au cours des dernières semaines, le procureur a présenté des témoins et victimes de scènes de pillage. Ces témoins ont aussi apporté des précisions sur les Banyamulenge, surnom donné aux soldats du Mouvement pour la libération du Congo (MLC), la milice de Jean-Pierre Bemba.

Le sénateur congolais est accusé de crimes contre l’humanité pour les meurtres, les viols et les pillages commis en Centrafrique, en 2002 et 2003. La milice avait été appelée en renfort par le président d’alors, Ange-Félix Patassé, menacé par les rebelles de François Bozize qui s’étaient finalement emparés du pouvoir en mars 2003.

Début juin, le témoin 209 a expliqué que « les troupes que Bemba avait envoyées ici étaient composées de Rwandais et d’anciens soldats du président Mobutu. » Selon lui, « les Banyamulenge n’étaient pas, à l’origine, des militaires mais des fermiers, ils n’avaient pas l’habitude de porter des armes » et « c’est pour cette raison que je pense qu’au lieu de se battre, ils violaient les femmes et pillaient les biens, entre autres crimes ». S’exprimant en sango, « 209 » a estimé que les miliciens du MLC « étaient des indisciplinés qui ne respectaient pas le commandement, des paysans qui travaillaient dans des champs de haricots. Pour compléter l’effectif, on les avait enrôlés. »

Pour le témoin 110, une habitante du PK12, certains banyamulenges étaient déjà présents en Centrafrique avant le début des combats, fin octobre 2002. Ils « étaient employés de maison et cireurs de chaussures ». Interrogée par le substitut, Eric Iverson, sur leur rôle dans la guerre au coté des troupes de Bemba, elle a expliqué que « les cireurs étaient comme des indicateurs : ils pointaient les maisons des personnalités dans le quartier, afin que cela soit pillé ».

A la barre, le témoin 112 a lui, détaillé les biens tombés entre les mains des rebelles qui l’on tabassé à son domicile. « J’avais un grand poste de radio. J’avais un matelas en mousse, épaisseur 18. Il y avait mes habits, mon lit, les lattes, j’avais une machine à coudre, j’avais un moulin à manioc, sans parler de ma maison dont les portes et les ouvertures ont été enlevées et transformées en bois de chauffe. » Interrogé sur la valeur perdue, « 112 » l’évalue à 3,2 million de francs CFA (4900 euros). « Ils chargeaient les biens dans des véhicules et faisaient traverser les check point avec ça. Donc pour moi, ils emmenaient tout cela de l’autre côté du fleuve », en République démocratique du Congo.

Plus tard, « 112 » doit faire, pendant dix jours, les travaux ménagers de soldats de Bemba, dont l’un de leurs chefs, qui occupent une maison à Begoua. A la barre, le témoin a assuré que ce commandant était en contact régulier avec Jean-Pierre Bemba. « Je l’ai su parce qu’à chaque fois, quand le téléphone sonnait, il décrochait et se mettait à parler leur langue, notamment le lingala, a-t-il expliqué aux trois juges. Pendant ce temps, je m’occupais des tâche telles que moudre le manioc, laver le linge. » Mais le témoin n’a pas pu rapporter la teneur de ces conversations.

Après lui, un magistrat centrafricain a affirmé avoir, lui aussi, été victime de pillages. Déposant par vidéo-link depuis Bangui, Flavien Mbata n’était pas présent à son domicile du PK12, qu’il avait fui au début des combats. A son retour, il y a retrouvé deux documents, appartenant selon lui aux hommes du MLC. Un manuel d’entraînement militaire et un rapport d’opération, portant tous deux la mention « Armée de libération du Congo ».

Le procès de Jean-Pierre Bemba a débuté le 22 novembre 2010. A ce jour, 1619 victimes participent au procès, via leurs avocats. La chambre a fixé au 16 septembre 2011 la date limite au-delà de laquelle aucune autre victime ne pourra être admise à participer au procès.